Dans cette section, on compare différents types de comportements à l'infini, à savoir
Toutes ces suites tendent vers l'infini lorsque \(n\to\infty\): \[ \lim_{n\to\infty}e_n=+\infty\,,\qquad \lim_{n\to\infty}p_n=+\infty\,,\qquad \lim_{n\to\infty}\ell_n=+\infty\,. \] Pourtant, elles ne tendent pas vers l'infini à l'infini: certaines tendent vers l'infini plus vite que d'autres.
Il est donc naturel d'établir rigoureusement une hiérarchie entre ces trois comportements:
Théorème: (Comparaison des divergences lorsque \(n\to\infty\))
1.
Remarquons d'abord que si on sait traiter les cas où \(\alpha\) est entier,
alors on sait aussi traiter le cas d'un \(\alpha\) quelconque.
(En effet, pour tout \(n\geqslant 1\), \(\frac{n^\alpha}{r^n}\leqslant
\frac{n^{\lfloor\alpha\rfloor+1}}{r^n}\),
donc si \(\frac{n^{\alpha'}}{r^n}\to 0\), avec
\(\alpha'=\lfloor\alpha\rfloor+1\geqslant \alpha\), alors \(\frac{n^\alpha}{r^n}\to
0\) aussi.)
Pour simplifier, considérons le cas \(\alpha=r=2\). On aimerait donc montrer que
\[
\frac{n^2}{2^n}\to 0\,.
\]
L'idée est d'utiliser la formule du binôme pour montrer que le dénominateur est
plus grand qu'une puissance supérieure à \(n^2\). En effet, la formule du binôme
avec \(x=y=1\) donne
\[ 2^n=(1+1)^n=\sum_{k=0}^n\binom{n}{k}1^{n-k}1^k=\sum_{k=0}^n\binom{n}{k}\,.\]
Or comme tout les termes de cette dernière
somme sont positifs, la somme est plus grande
que n'importe lequel de ces termes. Dans notre cas, il suffit de ne garder que
le terme correspondant à \(k=3\)
\[\sum_{k=0}^n\binom{n}{k}\geqslant \binom{n}{3}=\frac{n!}{(n-3)!3!}
=\frac{n(n-1)(n-2)}{6}\,.\]
Ceci implique que
\[
0\leqslant \frac{n^2}{2^n}\leqslant
\frac{n^2}{\frac{n(n-1)(n-2)}{6}}
=\frac{6n^2}{n(n-1)(n-2)}\,.
\]
On voit que dans ce dernier quotient, le numérateur se comporte en \(n^2\),
alors que le dénominateur se comporte en \(n^3\),
ce qui implique que sa limite est nulle. Plus précisément,
\[
\lim_{n\to \infty}\frac{6n^2}{n(n-1)(n-2)}
=\lim_{n\to \infty}\underbrace{\frac{1}{n}}_{\to 0}
\underbrace{\frac{6}{(1-\frac1n)(1-\frac2n)}}_{\to 6}=0\,.
\]
Par le théorème des deux gendarmes, on conclut donc que \(\frac{n^2}{2^n}\to
0\).
Dans le cas général, pour une exponentielle de base \(r>1\) et une
puissance entière \(\alpha\) quelconque, on peut
adapter la preuve ci-dessus. En effet, en
écrivant \(r=1+\lambda\), où \(\lambda>0\), et en
utilisant à nouveau la formule du binôme, on peut minorer
\[
r^n=(1+\lambda)^n\geqslant \binom{n}{\alpha+1}\lambda^{\alpha+1}\,.
\]
Le reste de la preuve s'adapte facilement (voir la vidéo ci-dessus),
et mène à \(\frac{n^\alpha}{r^n}\to 0\).
Une preuve semblable de cette première affirmation,
même si ça ne se voit pas tout de suite,
peut se trouver ici.
2. On peut démontrer la deuxième affirmation à l'aide de la première.
On reviendra sur les limites étudiées ci-dessus, lorsque nous étudierons la Règle de Bernoulli-l'Hôpital.