Comme \(\mathbb{R}\), l'ensemble des nombres complexes, noté \(\mathbb{C}\),
est un corps, c'est-à-dire un ensemble muni des opérations
\(+,-,\cdot,\div\), satisfaisant aux propriétés usuelles.
Ce qui rend ce corps particulier est qu'il est formé de paires de réels, ce qui
rend le produit ''\(\cdot\)'' étrange au premier abord:
Exemple: \((1,2)\cdot (-3,4)=(-11,-2)\).
Exemple: \((\alpha,0)\cdot (x,y)=(\alpha x-0\cdot y,\alpha y+0\cdot y)=(\alpha x,\alpha y)\).
Lemme: (Propriétés des opérations \(+\) et \(\cdot\))
(Voir exercices.)
Comme pour les réels, on écrira \(zz'\) au lieu de \(z\cdot z'\). On utilisera aussi la notation \[z^n:= \underbrace{z\cdots z}_{n\text{ fois}}\,.\]
\(\bigstar\) Remarquons que l'on n'introduira pas d'ordre total sur \(\mathbb{C}\), c'est-à-dire que l'on ne définira pas, comme on le fait sur \(\mathbb{R}\), de symboles tels que ''\(\leqslant,\geqslant,\lt,\gt\)''. En effet, entre \((1,2)\) et \((2,1)\), lequel définir comme étant le ''plus grand''?
Remarquons que sur le sous ensemble de \(\mathbb{C}\) formé des paires dont la deuxième composante est nulle, \((x,0)\), on a les propriétés suivantes:
Ces propriétés montrent que les nombres complexes \((x,0)\) se comportent essentiellement comme des nombres réels, ce qui mène à faire l'identification suivante: ''\(\mathbb{R}=\{(x,0)\in \mathbb{C}\,:\,x\in \mathbb{R}\}\)''. qui permet de faire comme si \(\mathbb{R}\) était un sous-ensemble de \(\mathbb{C}\). De plus, lorsqu'aucune ambiguïté n'est possible, on écrira simplement ''\(x\)'' au lieu de ''\((x,0)\)''. Par exemple, \(0\) sera considéré comme étant \((0,0)\).
Définissons le complexe \[ \mathsf{i} := (0,1)\,. \] On remarque alors que \[(-\mathsf{i})^2=\mathsf{i}^2=(0,1)\cdot (0,1)=(-1,0)=-1\,,\] et donc que \(\mathsf{i}\) et \(-\mathsf{i}\) sont solutions de l'équation \[ z^2+1=0\,. \] En d'autres termes, dans \(\mathbb{C}\), le polynôme \(z^2+1\) peut être factorisé (ce qu'on ne peut pas faire dans les réels!): \[ z^2+1=(z-\mathsf{i})(z+\mathsf{i})\,. \]
Puisque \(\mathsf{i}\) est un complexe dont le carré vaut \(-1\), on pourra abuser un peu de la notation suivante: \[ \mathsf{i}\equiv\sqrt{-1}\,. \]
'' Toutes les expressions comme \(\sqrt{-1},\sqrt{-2},\dots\) sont des nombres impossibles ou imaginaires, puisqu'ils représentent les racines carrées de quantités négatives ; de ces nombres, nous pouvons seulement affirmer qu'ils ne sont ni zéro, ni supérieurs à zéro, ni inférieurs à lui, ce qui nécessairement les rend imaginaires ou impossibles. ''Leonhard Euler, env 1750
On peut maintenant écrire, pour tout complexe \((x,y)\in \mathbb{C}\), \[ (x,y)=(x,0)+(0,y)=(x,0)+(0,1)y\equiv x+\mathsf{i} y\,, \] ce qui mène naturellement à nommer différemment les réels \(x\) et \(y\) qui composent \((x,y)\):
Remarque: Avec cette notation, l'expression du produit de \((x,y)=x+\mathsf{i} y\) et \((x',y')=x'+\mathsf{i} y'\) s'obtient en calculant \[\begin{aligned} (x,y)\cdot(x',y')&=(x+\mathsf{i} y)(x'+\mathsf{i} y')\\ &=xx'+xy'\mathsf{i} +x'y\mathsf{i} +yy'\underbrace{\mathsf{i}^2}_{=-1}\\ &=(xx'-yy')+\mathsf{i}(xy'+x'y)\\ &=(xx'-yy',xy'+x'y)\,. \end{aligned}\]
On a \[\begin{aligned} \mathrm{Re}(z+z')&=\mathrm{Re}(z)+\mathrm{Re}(z')\,,\qquad\\ \mathrm{Im}(z+z')&=\mathrm{Im}(z)+\mathrm{Im}(z')\,. \end{aligned}\] Comme on a dit plus tôt, les nombres sans partie imaginaire (\(\mathrm{Im}(z)=0\)) sont identifiés avec les réels. Aussi, les nombres sans partie réelle (\(\mathrm{Re}(z)=0\)) sont les nombres purement imaginaires. En particulier, \(\mathsf{i}\) est purement imaginaire.
Remarquons que \[ (x+\mathsf{i} y)(x-\mathsf{i} y)=x^2+y^2\,. \] Ceci mène naturellement à introduire deux notions:
Lemme: Le conjugué et le module jouissent des propriétés suivantes:
On peut calculer une division \(\frac{z}{z'}\) en divisant et multipliant par le conjugué de \(z'\): \[\begin{aligned} \frac{z}{z'}= \frac{x+\mathsf{i} y}{x'+\mathsf{i} y'}&= \frac{(x+\mathsf{i} y)(x'-\mathsf{i} y')}{(x'+\mathsf{i} y')(x'-\mathsf{i} y')}\\ &= \frac{xx'+yy'+\mathsf{i}(yx'-xy')}{x'^2+y'^2}\\ &= \underbrace{\frac{xx'+yy'}{x'^2+y'^2}}_{=\mathrm{Re}(\frac{z}{z'})} +\mathsf{i} \underbrace{\frac{yx'-xy'}{x'^2+y'^2}}_{=\mathrm{Im}( \frac{z}{z'})}\,. \end{aligned}\] Cette expression permet aussi de retrouver la formule pour l'inverse: \[ z^{-1}=\frac{1}{z} =\frac{x}{x^2+y^2}-\mathsf{i}\frac{y}{x^2+y^2} =\Bigl(\frac{x}{x^2+y^2},\frac{-y}{x^2+y^2}\Bigr)\,. \]
Remarque: Soient \(z=x+\mathsf{i} x\), \(z'=x'+\mathsf{i} y'\). Alors \[ z=z'\qquad \Leftrightarrow \qquad x=x'\text{ et }y=y'\,. \] On utilise cette propriété pour résoudre des équations.
Exemple: Résolvons l'équation du premier degré en \(z\) donnée par \[ z-3\mathsf{i} z -3+6\mathsf{i}=0\,. \] Une manière de procéder est d'isoler \(z\), et de faire la division à l'aide du conjugué: \[ z=\frac{3-6\mathsf{i}}{1-3\mathsf{i}}=\frac{21}{10}+\mathsf{i}\frac{3}{10}\,. \] Sinon, on peut aussi poser \(z=a+b\mathsf{i}\), injecter dans l'équation de départ et réarranger: \[\begin{aligned} 0&=(a+b\mathsf{i})-3\mathsf{i}(a+b\mathsf{i})-3+6\mathsf{i}\\ &=(a+3b-3)+\mathsf{i}(b-3a+6)\,. \end{aligned}\] Or pour qu'un nombre complexe soit le complexe nul \(0+\mathsf{i} 0\), ses parties réelles et imaginaires doivent toutes deux être égales à zéro, ce qui implique que \(a\) et \(b\) sont solutions du système \[\begin{aligned} a+3b-3&=0\\ -3a+b+6&=0\,, \end{aligned}\] ce qui donne \(a=\frac{21}{10}\), \(b=\frac{3}{10}\).