Dans ce chapitre, nous laissons les systèmes de côté un instant, pour introduire le langage de base nécessaire au développement de l'algèbre linéaire dans les espaces \(\mathbb{R}^n\), \(n\geqslant 1\). Pour commencer, nous introduirons la notion de vecteur, centrale en algèbre linéaire, et particulièrement utile pour décrire les systèmes.
On l'a déjà mentionné plus haut: toute
liste de nombres réels \((x_1,x_2,\dots, x_n)\) peut être identifiée avec un
point de l'espace \(\mathbb{R}^n\). Or les points de \(\mathbb{R}^n\) sont plus facilement
manipulables lorsqu'on les interprète comme des objets appelés vecteurs.
On identifiera donc \((x_1,\dots,x_n)\) avec le vecteur
(dit aussi vecteur-colonne), noté
\[
\boldsymbol{x}=
\begin{pmatrix}
x_1\\
x_2\\
\vdots\\
x_n
\end{pmatrix}\,.
\]
\(\bigstar\) En analyse, \(\mathbb{R}^n\) est considéré comme un ensemble de points. En algèbre linéaire, \(\mathbb{R}^n\) est considéré comme un ensemble de vecteurs.
Il est clair que la liste \((x_1,\dots,x_n)\) et le vecteur \(\boldsymbol{x}\) contiennent la même information, mais ici il faut interpréter \(\boldsymbol{x}\) comme le déplacement depuis l'origine jusqu'au point \((x_1,x_2,\dots, x_n)\). Par exemple, dans le plan \(\mathbb{R}^2\),
ou dans l'espace \(\mathbb{R}^3\):
L'avantage d'identifier des points avec des vecteurs est que le langage vectoriel permet d'introduire des opérations qui rendent les vecteurs propices au calcul.
On munit l'ensemble des vecteurs de \(\mathbb{R}^n\) de deux opérations:
Remarque: En petites dimensions, \(n=2\) et \(n=3\), l'addition vectorielle peut s'interpréter géométriquement comme la règle du parallélogramme:
Le vecteur nul est celui dont toutes les composantes sont égales à zéro. On le notera \[ \boldsymbol{0}= \begin{pmatrix} 0\\ 0\\ \vdots\\ 0 \end{pmatrix}\,. \] Par définition, on a \(0\boldsymbol{x}=\boldsymbol{0}\) , et \[ \boldsymbol{x}+\boldsymbol{0}=\boldsymbol{x}\,. \] Pour tout vecteur \(\boldsymbol{x}\), on appelle opposé de \(\boldsymbol{x}\) le vecteur \(-\boldsymbol{x}:= (-1)\boldsymbol{x}\). Par définition, \[\boldsymbol{x}+(-\boldsymbol{x})=(-\boldsymbol{x})+\boldsymbol{x}=\boldsymbol{0}\,.\] Les opérations d'addition et de multiplication par un scalaire permettent de manipuler les vecteurs à l'aide de calculs. Ces calculs obéissent aux règles standard de l'arithmétique:
Ces propriétés ne font que refléter une propriété élémentaire semblable, valide dans le corps des nombres réels. Ci-dessous, on indiquera par le symbole \(\stackrel{{\color{red}!}}{=}\) une identité obtenue en utilisant une propriété de base dans les réels, pour chacune des composantes:
Avec ces propriétés, on peut résoudre des équations vectorielles, dont l'inconnue est un vecteur \(\boldsymbol{x}\), de la même façon qu'on résout des équations élémentaires où l'inconnue est un réel \(x\).
Exemple:
Considérons deux vecteurs \(\boldsymbol{a},\boldsymbol{b}\in \mathbb{R}^n\) fixés,
et étudions l'équation vectorielle
\[
2\boldsymbol{a}-3\boldsymbol{x}=5\boldsymbol{x}+7\boldsymbol{b}\,.
\]
Utilisons les propriétés démontrées ci-dessus pour isoler \(\boldsymbol{x}\),
comme on le fait quand on résout une équation en arithmétique élémentaire.
Rajoutons \(+3\boldsymbol{x}\) des deux côtés.
Du côté gauche, détaillons l'utilisation des propriétés:
\[
2\boldsymbol{a}-3\boldsymbol{x}+3\boldsymbol{x}=2\boldsymbol{a}+(-3+3)\boldsymbol{x}=2\boldsymbol{a}+0\boldsymbol{x}=2\boldsymbol{a}
+\boldsymbol{0}=2\boldsymbol{a}\,.
\]
En procédant de même du côté droit,
on obtient
\[
2\boldsymbol{a}=8\boldsymbol{x}+7\boldsymbol{b}\,.
\]
En soustrayant \(7\boldsymbol{b}\) des deux côtés,
\[
8\boldsymbol{x}=2\boldsymbol{a}-7\boldsymbol{b}\,,
\]
puis en multipliant par \(\frac18\),
\[
\boldsymbol{x}=\tfrac14\boldsymbol{a}-\tfrac78\boldsymbol{b}\,.
\]